JULIETTE DRAGON « Hurluburlesque »

Juliette Dragon : je suis un garçon manqué !


On aurait voulu titrer « Juliette Dragon : crache ton venin ! », mais d’une part c’est plutôt de feu qu’il s’agit, et d’autre part, la reine du Burlesque made in Paris (qui possède bien d’autres cordes à son arc) n’a rien d’une venimeuse. Un personnage et une personnalité qui ne distille qu’humanité, bon sens et culture rock bien affirmée. Une « belle personne » comme on dit aujourd’hui.

C’est à l’occasion d’un passage près d’Avignon dans un concert à Akwaba, entre Legendary Tiger Man et Pasteur Guy Band, que l’on coince Juliette Dragon dans l’Akwabus qui sert d’entrée, en plein mistral glacé. La veille, elle a joué avec son groupe Rikkha pour une de ses « Nuit fatale » qu’elle organise avec Seb Le Bison, son alter ego et compagnon. Puis elle a sauté dans un train pour un stage burlesque où elle nous livrera que deux des participantes étaient des militantes d’extrême droite, peu enclines à participer au thème « Gore burlesque » et même pas trop décidées à se déshabiller sur scène (!), ce qui expliquera une apparition très écourtée entre les deux rock’n roll band de la soirée. Ambiance sud-est !


Le lendemain elle filait à Sète, pour rentrer dès le lundi reprendre son activité à l’Ecole des filles de joie qu’elle a montée depuis six ans. Une vie de patachon pour celle qui, sur son Facebook, glisse des images du Dalaï Lama ou de Rudolf Noureev, des messages végétariens, entre les Cramps ou des vieux titres sixties. Danse, méditation et rock’n roll band. Iggy Pop en plus grande !

Autrefois, dans Abus, j’avais une rubrique qui s’appelait « Personality crisis » et la première question était : Nom, Age, Sexe, Formation, Profession, Signe astrologique …

Alors, Juliette Dragon, 40 ans, bientôt 41, sexe multiple, ouvert, très ouvert !! Taureau ascendant scorpion avec la lune en sagittaire, mercure en bélier, mars en verseau, Jupiter en verseau, ce qui fait une magnifique conjonction de ciel.

Dans ton cas on serait tenté d’ajouter : « Taille, Mensurations » ?

1,84m 95/70/90 et 43 fillette !

Tu es de Montpellier, raconte-nous un peu ton parcours !

Je suis née à Paris, mais ma mère avait hérité d’une maison à Montpellier et comme elle pensait que c’était mieux d’habiter à la campagne, j’y suis resté de l’âge de 15 jours à 23 ans. J’aime à dire que c’est là où j’ai grandi, c’est dire le temps que j’y ai passé !

A partir de 20 ans, j’ai commencé à aller en rave et on m’a proposé d’être performeur, de danser, de faire ce genre de chose sexy. Je pensais bosser dans les arts plastiques, être illustratrice ou faire de la BD, du dessin animé. Et, à l’instant où je suis monté sur une scène, j’ai arrêté le dessin pour incarner les personnages que je dessinais avant, parce que je dessinais essentiellement des gonzesses.

J’ai toujours été fascinée par l’iconographie féminine, que ce soit les pin-up, les stars hollywoodiennes, les supers héroïnes de BD… Du coup, j’ai beaucoup incarné cela dans les rave-party. J’ai écumé toutes les salles du sud de la France et en deux ou trois ans j’avais vraiment fait le tour. Alors je suis parti à Londres un mois et, au retour, Montpellier me semblait tout petit. Et un amant m’a appelé : « quand est ce qu’on se voit ? », et j’suis montée à Paris ; et ça fait dix-huit ans !

J’ai été embauchée comme gogo danseuse au Palace et aux Folies Pigalle, le dernier été avant que ça ferme. Puis, j’ai rencontré des copines qui avaient repris le Pulp. Elles montaient une équipe fixe. J’ai accepté de bosser au bar et au vestiaire à condition d’avoir la liberté de danser, car je voulais être sur scène. Je crois que j’ai été la meilleure vestiaire. Je gagnais très bien ma vie et j’avais carte blanche pour créer des numéros, mettre en scène mes idées. Je pouvais également organiser des soirées. J’ai invité tous mes amis (artistes, musiciens, DJ, danseuses, performers) à faire des numéros ; c’est comme ça qu’est né le Collectif Surprise Party en 2003.

A chaque fois, je donnais un thème. Un jour ça a été « Le cabaret des filles de joie » et c’est devenu une troupe. Tous ceux à qui ça parlait de se foutre à poil en musique ont intégré la troupe, c’était cool !

Au bout de quelques années, on m’a dit que c’était du Burlesque, et j’ai dit « j’suis pas un clown ». C’est alors que j’ai découvert ce mouvement, qu’il y avait d’autres filles qui se mettaient à poil sur une scène avec des corsets, des plumes… aux Etats-Unis. Jusque-là, je considérais qu’on faisait du cabaret.

Qu’est-ce qui conduit une fille à vouloir faire du striptease (même si je sais que le striptease c’est pour des clients, et le burlesque pour du public) ?

Un terrible manque affectif ! J’peux pas faire plus court.

En quoi la scène new burlesque est-elle différente de celle des origines ?

Le Burlesque a commencé à la fin du 19e siècle et s’est éteint à la fin de la Belle époque (1914). Elle est revenue en pleine bourre dans les années folles, entre deux guerres, avec des femmes comme Colette par exemple. Colette était écrivain, gouine et stripteaseuse. Il y a eu tout un mouvement de femmes qui se coupent les cheveux, ne portent pas de corset (Coco Chanel), qui ne veulent pas faire d’enfant (de la chair à canon), qui n’ont pas envie de se marier, n’ont pas besoin des hommes et revendiquent de faire ce qu’elles veulent de leur corps. Ce qui était d’une subversion torride à l’époque, et le reste encore aujourd’hui. Car, quand tu montres ton corps sur une scène, t’es vraiment qu’une pute, pour certains.

Puis, le mouvement (Pin-up incluses) s’éteint à la fin des 60’s avec la révolution sexuelle et l’arrivée de la pornographie, quand d’un coup on peut voir l’intérieur d’un vagin et plus encore, tout ce genre de trucs super intéressants !

Il renait sous le nom de «New-Burlesque » dans les années 90. On reprend les codes des stripteaseuses, les même costumes, les nippies, les coiffures, les corsets, les plumes, mais c’est des nanas tatouées de la scène punk-rock, ça démarre même à la suite des Riot Grrrl.

Elles reprennent le militantisme des années 30. On reprend les codes, on se les approprie, ça fait des gogo danseuses rock. Cela a permis à certaines filles de trouver leur place dans un milieu rock assez macho, sans devenir des bimbos, d’assumer leurs corps mais en restant au contrôle, à l’encontre des canons ou des stéréotypes de la beauté. C’est une posture, un engagement politique.

Je fais ce que je veux de mon corps, et que je sois grosse, grande, petite, jeune, vieille (cf. Beth Ditto, son autobiographie, ndr), je vais montrer mon corps, même si je ne ressemble pas aux filles des magazines de mode.

Quel sont les publics du burlesque aujourd’hui ?

Le public est à 75 % féminin, et ça pose un problème aux hommes antisexistes, alterno, de gauche… ils ne savent pas où se foutre. Ils se disent  » j’suis pas macho « , n’osent pas applaudir… Donc c’est les gonzesses qui hurlent, parce qu’elles ont le droit, elles ! Et les mecs qui gueulent « à poil » ils se font incendier. C’est assez délicat, difficile de se positionner pour les garçons qui sont jeunes aujourd’hui. Ils n’ont pas l’habitude qu’on rende hommage à la beauté féminine sans passer pour un macho et je trouve ça dommage parce que faire un show avec des meufs à poil, quand c’est bien fait, ça met tout le monde de bonne humeur ! Les filles, parce qu’elles se disent « ah, moi aussi je peux le faire, c’est une libération, c’est génial » et puis les mecs parce que c’est sympa de voir des filles à poils quoi ! Faut pas se voiler la face.

Et le lien avec la scène rock ? Je dirais même le lien avec la scène rock qui reprend les codes et les clichés, comme la TAF par exemple : pin-up, bagnoles, motos… imagerie fifties, métal, punk… ?

Très sexué, tu veux dire. Si je prends la TAF, je ne les connais pas assez pour te donner un avis. Simplement, ils ont l’ouverture d’esprit de m’avoir embauchée pas mal de fois. J’étais MC (Maitresse de Cérémonie), habillée en pin-up sur plusieurs Holidays in the Sun et autres festivals avec les Wash (Washington Dead Cats, ndr).

Avec les Hell’s qui font le SO, on est en plein dans le cliché.

Oui mais faut quand même dire un truc, les Hell’s qui font la sécu à la TAF, ils le font mortel. J‘ai jamais vu des mecs aussi mortels à la sécu, et on a plein de potes Hell’s de toute façon.

Il y a un vrai lien établi avec la scène rock, c’était moins évident dans le burlesque vintage.

Quand même, dans les années 30, il y avait du jazz très énervé qui accompagnait cette scène-là. Je dirais même franchement que l’une des premières punks rockeuses était Mistinguett. Si tu lis ses textes, quand elle clame que le meilleur démaquillant après un spectacle c’est le sperme de ses danseurs, ça décoiffe.

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En dehors de Paris ou il règne une concentration des activités Burlesque, qu’est-ce qu’il se passe dans la « France profonde » où tu te ballades régulièrement ?

Nous avons l’impression que le Burlesque est très rock, parce qu’on vient un peu de là, que je suis très rock et que comme je suis la première meuf à avoir fait du Burlesque en France, j’ai décidé qu’il devait être rock parce que ça me plaît, que c’est moi qui décide. C‘est très prétentieux mais c’est vrai. En revanche, dans mes élèves, dans cette école que j’ai depuis 6 ans, 80% ne sont pas rock du tout, elles veulent à la base être sexy pour faire plaisir à leur mari. Moi, je le fais pas pour mon mari (Juliette Dragon et Seb le Bison sont mariés depuis 2010, ndr), même s’il adore ça !

Je crois que c’est divin comme sensation de s’exprimer en tant que femme et trouver un pouvoir qui n’est pas celui des hommes pour le caricaturer. Un pouvoir qui n’a rien à voir avec celui que cherchent les hommes, une puissance de séduction liée à une certaine imagerie de la femme (voir l’essai « Reflets dans un œil d’homme » de Nancy Huston, Ndr). Et moi je trouve que cela va très bien avec le rock’n roll, pourquoi ? Parce que quand tu fais un strip devant des rockeurs, ils te respectent, parce qu’ils ont la culture pin-up.

Maintenant, les gonzesses qui veulent du Burlesque, souvent elles veulent juste être sexy, elles ne veulent pas faire de sport ni danser, juste mettre des corsets et s’affiner la taille dedans. Je trouve ça nul. Il y a toute une scène pseudo jazzy et faux swing qui n’émerge pas vraiment parce que ce n’est pas d’une très grande qualité. C’est pas ma came.

Que ce soit Mick, Iggy ou même Elvis, ne crois-tu pas qu’ils ont mis en avant une grande part de féminité ?

Elvis je ne sais pas, mais Iggy ou Mick Jagger n’ont jamais caché leur côté bi. Je crois tout simplement que rock’nroll qui signifie « s’envoyer en l’air » va avec une sexuation, la manière de se tenir, de bouger.

Je ne crois pas au 100 % hétéro, c’est bien qu’un homme assume sa part de féminité. Donc je ne sais pas si c’est féminin, mais c’est sexué. Il y a plein de trucs qui ont une énergie rock’n‘roll, que ce soit électro ou pas, c’est une énergie sexuelle. Jim Morrison ne jouait que là-dessus au début, et même les Beatles lorsqu’ils mettent les filles en transe.

Quelle est la démarche de tes stages ?

Mon but est que les filles prennent confiance en elles, acquièrent une assurance et se trouvent belles de l’intérieur. Ce que je fais c’est vraiment de l’art-thérapie. Parfois, certaines pleurent, se lâchent, et pour d’autres ça va plus loin, leur vie change du tout au tout, elles déménagent, changent de boulot… y’a parfois de grosses révélations dans mes stages, mais ce n’est pas dit officiellement !

Je travaille depuis peu avec un psy de l’hôpital St Louis sur les cancers du sein. Comment se réapproprier son corps après l’ablation du sein et comprendre que la féminité ce n’est pas forcément les nibards !

Freud dit, le masculin c’est le phallus, et le féminin c’est le non-phallus et les filles répondent toujours « nous on a des seins ». Mais ce n’est pas leur phallus, ce n’est pas leur féminin, donc c’est compliqué pour se réconcilier avec une féminité qui socialement n’existe plus. On a tout basé sur les nibards !

Ah, le Wonderbras !

C’est phallique ! Il faut un gros machin quelque part, c’est psychanalytique. Les filles veulent des gros seins, c’est pas forcément une demande des mecs.

Comment définir le féminisme du 21e siècle ?

Et quand on parle de féminisme, elle règle un peu des comptes, pas faciles de défendre une posture différente, du 21e siècle.

Des féminismes il y en a plein. Effectivement, je m’estime féministe, je me proclame féministe, je sais que je me fais descendre par d’autres féministes, pour la raison que je serais une femme objet, que je plais aux hommes, alors évidement, je suis une vendue. Je trouve déplorable que l’essentiel des féministes vivent leur féminité déguisées en homme. Je trouve cela triste. Je pense qu’il y a des codes qui appartiennent aux hommes et c’est bien.

On a le droit de ressembler à une imagerie de gonzesse qu’on s’invente sans pour autant copier celle des hommes.

Je ne dis pas qu’il faille hyper sexualiser le quotidien comme un archétype de pin-up, je ne dis pas que j’ai la clé de « à quoi doit ressembler une femme ». Cela a évolué au cours des siècles.

Il y a beaucoup de féministes que je croise, qui ont eu des combats qu’il était essentiel de mener dans les 70′s, comme Geneviève (Fraisse) que j’ai croisé lors d’un débat et qui m’a dit  » j’aurais votre âge, j’aurais votre positionnement « . Mais elle reconnaît que pas mal n’ont pas bougé d’un iota (dans les féministes historiques). Elles n’ont pas de sexualité, sont aigries et malheureuses comme des pierres. Eelles n’ont pas compris qu’il s’était passé 40 ans.

Dans un récent documentaire sur Arte, des féministes historiques (Juliette D : tu veux dire « hystériques » !) déclaraient à propos des Femens « ce serait parfait si elles n’étaient pas uniquement jolies, jeunes, blanches… »

Ça c’est la volonté de la patronne (leader) des Femens, parce qu’il y a des thons, mais elle les cache pour les photos !!

Le féminisme selon Juliette Dragon, c’est par exemple être pour la prostitution choisie. J’estime qu’une femme doit pouvoir faire exactement tout ce qu’elle veut, aussi bien avec sa tête, qu’avec son corps. Si elle a envie d’être maman, elle a le droit. Si elle a envie de porter un voile, elle a le droit. Si elle ne veut pas faire d’enfant, elle a le droit. Si elle veut faire carrière, si elle veut être pute ou hardeuse, ou stripteaseuse et personne n’a à se mêler de ce qu’elle fait de son cul ! Voilà ce que je pense profondément.

Une fois cela énoncé, ce qui est plus compliqué si on prend le cas du voile par exemple : est-ce que c’est vraiment elle ou la pression sociale ? Et là on part dans des débats sans fin.

Donc, je rajouterai, le féminisme selon Juliette Dragon, c’est faire des stages où tu apprends à savoir ce que tu veux vraiment. C‘est une forme de psychanalyse, c’est une autre technique pour prendre conscience de qui on est vraiment, en dénouant les nœuds avec la famille et en sortant de la « pollution » généalogique qu’on a tous subi. Ça se travaille par des séances de relaxation, de méditation, des choses pour déprogrammer plein de trucs qui ne t’appartiennent pas.

Et je pense qu’il n’y a que par ce genre de technique que tu apprends à comprendre qui tu es réellement. Si porter le voile te rassure, pourquoi pas !

Comme il y a des prostituées qui y sont forcées, et là c’est abominable. Mais il n’y a pas que cela, il y a des gonzesses qui se prostituent parce qu’elles ont fait ce choix. On ne va pas dire que c’est amusant, mais travailler à l’usine n’est pas drôle non plus.

On retombe là dans le film de Jean Eustache « la maman et la putain » où ce thème de la comparaison entre prostitution et travail est abordé.

Je suis assez proche de Virginie Despentes qui est une copine, et elle en parle dans « King Kong Théorie » et je suis super d’accord avec ce qu’elle dit.

En pleine « théorie des genres », dans ton public ou dans tes stages, il y a de tout : homo, trans, trav, bi, hétéro… ?

Oui, des trans, j’en ai une qui est pénible en ce moment, elle me plombe le cours, mais sinon y’a de tout et c’est super.

On a tous une part Yin / Yang, masculin / féminin. Malgré les apparences (ou, on va dire, tes activités) est-ce que tu ressens un côté masculin prononcé chez toi ?

Très très fort. J‘ai même commencé par-là, j’étais un garçon très manqué. Ça s’explique très bien, ma mère ne voulait pas de fille. Quand je suis allée en rave, je me suis retrouvée dans les loges avec les performeurs et y’avait que des travelottes, qui se sont écriées  » Ah une vrai fille ! « . J’avais des Doc coquées, des bas déchirés et une mini-jupe, mais j’étais super garçonne.

Ce sont les travelottes qui m’ont appris à me travestir en femme et à me faire aimer que c’était chouette d’être une nana. C’est les travellos et les pédés qui m’ont appris à aimer les femmes. Alors, une part de masculin, oui, et développer le féminin, je travaille encore dessus !

Quel est le rôle des hommes dans tout cela ?

Il existe un mouvement d’effeuilleurs qui s’appelle « Boylesque », l’équivalent en garçon.

Avec Seb le Bison, qui coordonne un certain nombre de vos activités, vous voyez-vous comme des Clyde Bison / Bonnie Dragon, des Lux & Ivy ?

C’est joli, j’aime bien la formule. Il serait ravi, j’suis d’accord. On nous compare beaucoup à Lux et Ivy. Lors de la tournée en Californie (en février avec Rikkha), c’était tous les jours ; là-bas ils connaissent bien les Cramps. On nous a pas mal dit qu’on faisait penser aux Cramps, mais pas comme copy cat, puisquà priori c’est moi Lux et c’est lui Ivy.

Et alors, c’est assez génial, parce qu’on a eu un concert auquel sont venus assister le dernier batteur et le dernier bassiste des Cramps.


Rikkha semble prendre de plus en plus de place. C’était un rêve d’être sur scène pour chanter avec un groupe ? Y a-t-il eu des précédents ?

Je chantais déjà parfois avec les filles dans mon Cabaret lors de revues auxquelles ont participé Lord Fester, Igor et Yo des Wash(ington Dead Cats). J’ai fait des duos avec d’autres filles aussi. Et puis un jour, Seb le Bison est venu à un spectacle et m’a demandé si j’aimerais chanter dans un groupe de rock et j’ai dit  » oui, c’est mon rêve depuis que je suis toute petite « . Il m’a dit :  » les répètes c’est le mercredi soir «  et ça fait sept ans que ça dure. C’est une remise en cause aussi de chanter. Ça fait plus de vingt ans que je fais de la scène et j’ai plus du tout le trac. Je m’étais habituée à ce qu’on me dise « c’est génial » à la fin. Là, avec les concerts, c’est différent, je somatise, j’ai un vrai trac et, quand je sors de scène, je comprends parfois que j’ai été très mauvaise. Ca fait du bien à l’égo !

Quelle est l’importance de la scène Burlesque en France (fringues, photographes…) ?

Le burlesque est déjà fini. L‘apogée c’était il y a deux ans, mais là c’est descendant. C’était un vrai mouvement qui a monté, monté… En évènementiel c’était hype jusqu’à il y a deux ans. Maintenant on nous rétorque « Du Burlesque, oh non ! des petites grosses tatouées qui ne savent rien faire, c’est pas des vrais danseuses ».

Mais il y a des boutiques de fringue pin-up qui fleurissent…

Oui, ça devient mainstream, ça veut bien dire que c’est sur la pente descendante, c’est comme le punk et les t-shirt Ramones chez H&M.

Mais ce n’est pas grave, ça me permet de rebondir. J‘ai toujours fait du cabaret : du cabaret électronique, rock, féministe. Je continuerai, quelle que soit la musique : jazz, swing, hardcore

Voir Les Filles de joies avec No One Is Innocent (en 2009), c’était comique parce qu’ils sont antisexiste. Alors, voir des effeuilleuses avant eux, ils ne savaient plus quoi dire. Les meufs étaient choquées, parce qu’ils sont tolérants « mon cul ouais » : « pourquoi ils ont mis les putes avant le concert ? »

Côté esthétique, quelles sont tes références stylistiques ?

Quel est l’équilibre à trouver pour rester sexy et sensuelle sans tomber dans le too much…

Ma devise en loge c’est que si c’est pas trop, c’est pas assez ! Quant à Rikkha, on nous a récemment fait le reproche qu’on était trop costumés et qu’on risquait de laisser un souvenir plus visuel que musical. Mais bon c’est comme ça, on est costumés !


C’est le syndrome « Au Bonheur des dames / Marcel et son orchestre » !

Quand à mes références, c’est la haute couture, les supers héros, les comics et les mangas, et surtout beaucoup de BD. Il faut que ce soit graphique comme des personnages de BD : c’est noir/blanc/rouge ou noir/blanc et une couleur, voire trois couleurs pas plus. C’est des matières avec de la rayure, des pois, des choses hachurées comme des coups de crayons, pas mal de codes qui reviennent souvent. Ou alors des camaïeux, avec du bleu ciel. Tu vois, j’ai trouvé ces baskets vertes, avec un jean bleu, un sweet turquoise et un foulard bleu ciel. Moi j’adore. J’appelle ça la jouissance chromatique !

Un livre, un film, un docu, un disque qui t’ont marqués récemment ?

Le dernier Jim Jarmush « Only lovers left alive », un couple de Vampires qui sont ensemble depuis le 15e siècle. C’est à la fois romantique et très drôle. Lui qui est très dépressif, appelle les humains « les zombies ». C’est pas mal, un peu sur le principe des Lettres Persanes de Montesquieu. C’est un vrai message écolo et politique et il y a un vrai esthétisme avec des plans incroyables. Sinon on a revu tout Twin Peaks, c’est génial.

Côté livre, hier je suis tombé sur un Anthony Burgess que je ne connaissais pas, je vais le dévorer. Et j’adore la littérature russe d’avant la révolution, Dostoievski, Nabokov

Et pour la musique, on a découvert récemment André Williams, ce papy incroyable de 70 ans qui joue depuis les années 50 et a fait du blues déjanté, de la soul, du rock garage et et du punk rock.

Et le dragon c’est venu comment ?

C’est un peu comme en homéopathie, il y a des plantes qui soignent un peu tout, comme la lavande. Et bien pour moi le Dragon c’est la même chose, c’est à la fois le corps et l’esprit, les mangas et les arts martiaux (championne de France de Viet Vo Dao, Ndr), j’adore l’Asie. C’est en même temps l’aspect zen et un puissant animal avec une très grosse énergie, et je fais du feu en plus (diplôme de pyrotechnie, Ndr). Je me suis fait tatouer un dragon, et les gens pour se souvenir de moi, ils notaient « Juliette (dragon) ». Puis, un jour, j’ai enlevé les parenthèses.

Par Max Well & Juliette M. – mars 2014

Activités et contacts : L’école et Le Cabaret des filles de joie / Les nuits fatales de Juliette Dragon (dans divers clubs parisiens) / Le Paris Burlesque festival (4 éditions) / Le Riot Grrlz festival (3 édition) / Rikkha

www.collectif-surprise-party.com

www.lebison.com/

Crédits photos :

- En 2010, avec Carlos des WDC – photo Max Well

- Juliette M & Juliette D – photo Max Well

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