Casse Gueule – Interview

Casse Gueule, mais pas casse bonbon, ce groupe français réalise une musique qui mixe électro cheap/indus et chansons à textes (en Français) assez barrés.

En manque d’amours, le titre de leur premier album (en vinyle 180g) se nomme « L’Important C’est d’Aimer ». Abus Dangereux, dans sa bonté vous invites à leur en donner.
Le groupe ensemble et parfois par membre, nous réponds sans langue de bois, comme l’aurait dit Michel Polac. Et comme l’aurait signalé le Parisien, c’est une interview exclusive !

Qui es-tu Casse Gueule ? Vous pouvez nous présenter les membres, les groupes dans lesquels vous avez jouez avant CG, sans oublier le 4ème qui est le magnétophone.

C.G : Casse Gueule est composé de Matthieu Philippe de l’Isle aux synthétiseurs (également disponible dans Le Réveil des Tropiques, Eddie 135, Zonga Twighlight), Pierre le Dentiste aux autres synthétiseurs et Jonn Toad chanteur de charme (feu disponible dans JeanVas Brûler, La Fourche, Desicobra, Les Toads).
Casse Gueule est né au terme de l’été 2009. Nous avons commencé à quatre, mais, inspiré par les grandes théories industrielles en vogue, nous avons remplacé un gars par une boîte. Puis, entrainé dans la spirale du modernisme, nous avons remplacé les guitares par des machines électroniques, afin d’instaurer un sentiment d’harmonie.
Casse Gueule ne parle que de trucs essentiels, comme par exemple les histoires d’amour, et plus globalement de l’ensemble des sujets traitant de divorce et de meurtre.
Le magnétophone n’est que le loyal porte parole du groupe. Ses interventions, empreintes d’une spiritualité toute relative, ne manquent jamais de réconforter le spectateur d’un concert de Casse Gueule pour toutes les opinions qu’il peut avoir sous la main à ce moment-là !

Quelle est la part de second degré (musique, visuel, performance) dans Casse
Gueule ?

Le second degré ne fait pas partie de l’arsenal culturel de Casse Gueule. Casse Gueule s’attache à refléter la réalité du contexte spacio temporel dans lequel nous évoluons tous. Ce n’est sûrement pas de la responsabilité de Casse Gueule si la vie prend délibérément des allures de coussin péteur à la moindre occasion. Casse Gueule est avant tout un produit de son environnement. C’est plus simple.

Qu’est ce qui vous a motivé à créer l’entité Casse Gueule ?

Alors ça! (bruit de pet avec la bouche : « pfrrt! »), personne ne sait. Au départ d’un batteur découle l’utilisation d’une boite à rythmes. Mais notre producteur n’aimait pas les guitares sur les boîtes à rythme, alors on a remplacé les guitares par les synthétiseurs. Pour passer inaperçu, notre chanteur a opté pour la langue française, ça va bien avec l’aspect vénérable des synthétiseurs. De la précarité et de l’instabilité du parc matériel nait la tension en concert. De la tension en concert nait le caractère spectaculaire des performances de Casse Gueule, etc, etc. Encore une fois, Casse Gueule est généré par les contingences. C’est plus simple !

Vous chantez en français. C’est important pour vous la langue de Molière, Rimbaud, Dutronc pour vous exprimez?

Non. Si Casse Gueule évoluait en Chine, il y aurait fort à parier que Casse gueule s’exprimerait en mandarin. On est entouré de structures saturées de français, on s’exprime en français, c’est de la chimie, c’est plus simple.

Votre concept artistique est proche du mouvement Dada. Quels sont les leçons que vous avez retenues de ce mouvement? Etes-vous proches, inspirés par d’autre mouvements et personnalités (par exemple l’entarteur Noel Godin) ?

Jonn : Euuuh, Dada, pour moi, c’est avant tout l’album le plus abscons d’Alice Cooper.

Pierre le Dentiste : Casse Gueule ne peut s’empêcher d’éprouver une sympathie certaine pour l’ensemble des œuvres ayant vocation à provoquer un processus actif de consommation artistique chez le spectateur, selon l’adage bien connu de Marcel Duchamp d’après Wikipédia : « C’est le regardeur qui fait le tableau ». La consommation est un acte créateur qui souvent s’ignore. De ce point de vue, Casse Gueule s’identifie plus volontiers à la pissotière qu’à Marcel Duchamp lui-même. En tant qu’objet soumis à l’appréciation du public par un créateur, Casse Gueule s’attache principalement à rester aussi matériel que possible. On peut ainsi rajouter que si de grands profils (comme les fabricants de poulets ou, dans une moindre mesure,  l’antique industrie du disque ou le monde du spectacle) nous ont fourni beaucoup d’inspiration dans nos méthodes, notre préoccupation reste le matériau ductile d’énergie. C’est plus simple.

La musique des années 80’s a souvent été rejetée par les fans de rock(s), car les groupes utilisaient abusivement les synthés. C’est justement les synthés qui sont votre source sonore. Pourquoi le choix des vieux synthés ?

Matthieu : Je n’aime pas trop parler des années 80.

C.G : Instrument de prédilection N°2 dans la musique populaire, personne n’est d’accord quand à la légitimité de l’usage des synthétiseurs. A partir de quel seuil un usage devient-il un problème ? En tant qu’entité préoccupée par les pratiques artistiques abusives, Casse Gueule a naturellement choisi son camp. L’instabilité, l’obsolescence, le problème érigé en une forme de langage, la modernité au service de la dévaluation de l’humain sans pour autant proposer d’alternative valable sont de sources d’inspiration et d’énergie bon marché. Avec ces machines c’est plus simple.

Vous venez de sortir en vinyle votre premier album, dont le titre est « L’important c’est d’aimer ». L’amour, c’est vital pour vous ? Vous avez peur que votre album ne trouve pas le public qui va vous aimer ?

Le titre « L’important c’est d’aimer » fait avant tout référence à l’impérieuse nécessité de se conformer au processus universel d’animation de la matière. Pour les planètes, on parle d’attraction. Pour les animaux, on parle de puanteur suffocante, pour les êtres humains, on parle d’amour. Les voies de circulation peuvent parfois bénéficier d’un momentané bricolage intellectuel, comme une complémentaire santé ou un moteur diesel, mais l’intelligence n’est qu’un traçage au sol. La vérité, dans sa tellurique, qui vomit des peuples, et sa tectonique, qui en broie, est animée par l’amour. C’est plus simple.

J’ai l’impression que le succès est un thème qui vous hante. Comment allez- vous vous y prendre pour que Casse Gueule passe à la radio, à la TV, et recevoir un prix comme les Daft Punk ? Je n’ai pas trouvé de tube RnB dans l’album.

Ça se discute. Si on veut que le Rn’B demeure synonyme de victoire et de musique, tapis rouge exclusif vers l’Ordre des Chevaliers des Arts et des Lettres, il faut alors lui donner une juste concurrence. Vous voyez, nous sommes au service du Rn’B ET du succès!

Par ailleurs la promotion fait partie du champ d’expérimentation de Casse Gueule. Dans cette optique, Casse Gueule a décidé de célébrer la sortie de son 33 tours à la manière des Victoires de la Musique, en invitant les artistes les plus fabuleux de la métropole à la Société de Curiosités pour l’Exérèse Partielle, le 17 avril dernier. Nous avions invité pour cette soirée les artistes qui nous semblaient les plus performants dans leurs domaines respectifs : arts plastiques, arts dramatiques, technologie stéréo, chanson française, promotion de l’hyper-activité sexuelle, etc. Nous promouvons le succès dans TOUT ce que nous faisons, c’est plus simple.

Votre style mixe électro indus et chanson aux textes barrés. Le style sonore de Casse Gueule c’est construit, modelé avec avoir bu 3 litres de bières 8.6?

Comme évoqué précédemment, Casse Gueule est avant tout un produit de son environnement. Et dans cet environnement, qu’est-ce qu’on trouve? Des rues encombrées de sacs poubelles pleins de disques compacts balancés là par des individus désireux de faire un enfant au futur, des cadavres en sursis équipés d’iPod pleins de mixes electro-indus, des caissières qui lisent des textes barrés, et sûrement un peu de bière, entre autres choses. Dans ce déferlement d’appels au secours, on oublie trop souvent que la mystique du style est avant tout une question d’utilitarisme. Utilitaire en diable, Casse Gueule est un humble produit de son environnement. C’est plus simple.

Question simple, quels sont vos artistes, groupes, disques que vous aimez ? Et qu’importes les modes.

Pierre : Les trois membres de Casse gueule ont des gouts très éclectiques. Pierre le dentiste valide volontiers DEVO, Pere Ubu, Les Rita Mitsouko, Jacno.

Jonn : J’écoutais hier au soir un groupe suisse étonnamment affublé d’un puissant chanteur Maltais. Je ne citerai pas le nom du groupe car :
1) Le groupe ne me paierait pas la publicité.
2) Des esprits étroits se paieraient par contre ma fiole à bon compte.
3) Si ça se trouve, personne connaît.

Mais les quarante années de carrière de ce groupe, qui a successivement conquis un public (par le truchement d’une personnalité en forme de Rubik’s cube©) pour le perdre au profit d’un autre, devant être perdu en son temps, m’inspirent un sentiment très romantique, dans lequel la musique est avant tout un outil au service d’une muse très fugitive. Des comme ça, j’en ai des tas.

Matthieu : C’est vrai. Quand même dans le film Gummo il-y-a une jeune femme qui prote un T-shirt de ce groupe. Ça ne leur fait pas une pub géniale, mais pour ma part c’est ce biais que j’ai découvert l’existence du groupe en question. De même c’est grâce au dessin animé Beavis & Butthead que j’ai pu découvrir Helmet, Soundgarden ou encore Twisted Sister. Mais je n’ai jamais encore acheté de disque de Twisted Sister. Jonn tu as des disques de Twisted Sister ?

Jonn : Je les avais tous il y a 20 ans, mais je n’ai gardé que ceux que défendait leur chanteur dans une interview, ce que je regrette aujourd’hui.

Quels sont les projets et envies de Casse Gueule?

C.G : Casse Gueule aimerait, une fois la sortie de son 33 tours digérée, mettre en œuvre un projet de science fiction qui lui tient à cœur, parlant d’êtres humains ravis de leur sort. Une sorte d’opéra rock dystopique, un « stopéra » pourrait-on dire. Fidèle à son goût pour les collaborations les plus diverses, ce projet s’attachera à être le plus multimédia possible.

Et au-delà de ce « stopéra » donc, Casse Gueule aimerait expérimenter avec la notion de croissance et diversifier ses activités au-delà du monde du spectacle, et se rendre le plus utilitaire possible, présenter des émissions culinaires, amuser les troupes en Syrie ou s’aventurer au-delà du circuit de la musique. Mais tout ceci resterait expérimental, c’est plus simple.

Si vous avez des commentaires, messages et humeurs à formuler à nos lecteurs et lectrices, c’est ici.

Jonn : Ca me brise le cœur, mais je n’ai pas trouvé Abus Dangereux  dans le disquaire près de chez moi. Je pense toutefois qu’à l’époque où les médias sont si facile d’accès, la mission d’un fanzine indépendant reste cruciale car elle propose au lecteur le recul d’une perspective vis-à-vis d’un artefact affranchi de son contexte de conception (ex: la musique qu’on peut écouter n’importe où n’importe quand).

Matthieu : Quelque-chose comme ça.

Merci pour vos réponses!

C.G : Merci à toi Paskal!

PASKAL LARSEN

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