La Féline

Dans les griffes de la féline !

« Le rock ce n’est pas un style de musique, c’est un état d’esprit. »

Le bar rock La Féline a cette année 5 ans et toutes ses griffes. Situé dans le quartier populo de Ménilmuche à Paname, La Féline propose tous les soirs des concerts, DJ set, évènements, expos soit 1750 soirées et 400000 demis de bière d’absorbés. Géré par Patrice et une équipe rock’n’roll de choc, La Féline est un lieu incontournable pour le rockeur assoiffé, en mal d’un son garage punk où il pourrait croiser Iggy Pop, Joey Ramones, Betty Pages ou Johnny Cash.

Rencontre avec Patrice, juste après la ré-ouverture du bar, qui a du fermer à cause d’un incendie.

Cette année vous fêtez vos 5 ans d’activités. En quelques mots, les meilleurs (et pires) moments du bar ?

La Féline offre tous les soirs des concerts gratos, des shows, des djs et une équipe au bar qui fait la fête autant que les clients. Les moments inoubliables sont nombreux. Ceux partagés avec un client photographe particulièrement sympa, qui revient le lendemain pour m’offrir une photo de Lux Interior parce qu’il sait que je suis fan des Cramps. C’est un concert de petits jeunes endiablés. C’est des rencontres extraordinaires et de belles amitiés qui en sont nées. C’est un feu d’artifice tiré par Juliette Dragon dans la rue pour l’anniversaire du bar devant 400 personnes. C’est Kid Congo Power qui illumine le bar. C’est les Lords Of Altamont qui par deux fois ont fais exploser les murs. C’est un groupe australien (les Burn In Hell) qui récemment nous ont donné envie d’attaquer un bateau de pirates. C’est une série de 60 shooters sur le comptoir. C’est une discussion avec le bassiste des MC5 ou une bouteille de Jack Daniels descendue en 15 minutes avec les zicos du Jim Jones Revue.

Les pires ? Ben c’est cette année quand j’ai vu les pompiers découper mon rideau mécanique à 7 plombes du mat pour éteindre un feu dans le bar, et trois autres rentrer avec une hache pour s’acharner sur la cabine dj en flamme.

C’était quoi la cause ? Et ton activité pendant cette fermeture forcée ? Des vacances méritées ?

Le quartier est un peu en ébullition en ce moment, pour notre part l’incendie a eu lieu dans la cabine dj. Un putain de court-circuit électrique de merde un dimanche matin à 7 heures. J’ai eu droit à la visite du laboratoire criminel de la police judiciaire qui a rapidement conclu à un accident. Quant à la Cité du Labyrinthe c’est autre chose. Il y a eu des morts, des blessés et des familles entières se sont retrouvées à la rue, ça relativise mes emmerdes. Je n’ai pas vraiment eu de vacances forcées, nous nous sommes battus pendant deux mois avec Mathieu pour faire en sorte que La Féline revienne le plus vite possible et ça a été du sport, crois moi !

En 5 ans la clientèle a-t-elle changé ?

Nous avons une base de clientèle fidèle au bar depuis son ouverture et puis une qui tourne selon l’actualité, la mode ou la météo. Certain clients viennent tous les soirs, d’autres accompagnent les djs ou les groupes. Dans l’ensemble, les gens viennent depuis le départ parce qu’ils savent que le son va être bon.

Dans quelles circonstances as-tu créé la Féline ?

Je me suis retrouvé à bosser derrière un bar parce que j’ai radicalement changé de vie du jour au lendemain. Je suis un ancien pubard et ce métier de merde m’a saoulé au bout de 15 ans. Il me fallait gagner ma croute. J’ai travaillé quelques années pour les autres et à force de voir les gens s’amuser avec la musique que j’apportais, je me suis dis qu’il fallait que je me mette à mon compte. Il m’a fallu convaincre des partenaires et mon pote Mathieu avec lequel je suis associé. Quelques mois de recherches pour trouver le bon spot, quelques travaux et hop La Féline naissait.

Le nom de La Féline est il un hommage au film de Jacques Tourneur ?

Ha ha, c’est la question qu’on me pose le plus souvent ! Oui, bien sûr, je suis un fan de ce film et de bien d’autres. De Catwoman, de l’album des Stranglers, des Cramps et toutes l’imagerie qu’il y a derrière. C’est un hommage à la culture underground et aux gens qui aiment la nuit en général.

Vous êtes dans le quartier populaire de Ménilmontant. Vous pouvez nous parler de ce quartier ?

C’est un des derniers ilots populaires de Paris. On l’aime avec ses défauts et ses qualités. C’est un vrai lieu de mélange. Les tarifs sont abordables, les voisins plutôt tolérants, les commerçants compréhensifs. La rue Letalle est vraiment magique. En fin d’après midi les enfants sortent pour jouer, les voisins se croisent et discutent entre eux, un vrai petit village. Bref, je ne changerai pour rien au monde !

Non loin de La Féline, il y a le bar orienté red skin Le Saint Sauveur. Pas « trop » de problèmes avec ces voisins (patron, clientèle) ?

Je connais bien Le Saint Sauveur et jusqu’à ce jour nos relations sont bonnes. Une partie de la clientèle fréquente les deux bars, une autre non. Je suis content des les avoir eu comme voisins lors de coups durs et vice et versa. Je ne partage pas le radicalisme politique de certains d’entre eux mais je respecte leurs engagements.

Quelles sont les principales caractéristiques du rocker ?

Comme je me plais à dire, le rock ce n’est pas un style de musique, c’est un état d’esprit. L’amour du son, de la fête, le sens de l’honneur, la marginalité et un sens de la liberté sont ses principales qualités. Et son défaut ? Le rocker à tendance à oublier qu’il n’y a pas que le rock dans la vie !

Un rockeur bourré est-il facile à gérer ?

Un con c’est un con, qu’il soit rocker ou emo. S’il est chiant je lui explique qu’il vaut mieux aller dessoûler ailleurs. Mais ça se passe plutôt bien en général, si je fais la proportion entre le nombre de litres de bière qu’on vend et le nombre d’emmerdeurs, ça me parait pas mal.

C’est quoi le mode d’emploi pour le rendre gentil et doux comme un nounours ?

Ne pas les prendre pour des cons, leur parler gentiment et leur demander qu’il ne me prenne pas pour un con et qu’il me parle gentiment !!! (Clair?)

Vous êtes, je pense, tombés dans le rock, quand vous étiez très petits. Quelles sont vos idoles/styles de musiques qui vous ont fait grandir ?

Je suis issu d’un milieu plutôt classique où la musique qu’on écoutait à la maison sortait des émissions de Drucker. Il a fallu que je m’invente un univers, j’ai choisi celui là. On écoute les Clash, puis du rock steady, puis les Ramones, puis les Stooges, puis un peu de new-wave (c’était l’époque). On traine un peu avec des mecs louches, un peu plus vieux, (mais qui ont l’air beaucoup plus rigolos que les autres), on se construit une identité au fil des jours.

Malgré l’espace réduit de la scène, vous avez réalisé + de 600 concerts. Si le groupe est un duo, ça va, mais si le groupe comprend 6 personnes, comment gérez-vous l’espace ?

Ben faut demander au Whashington Dead Cats qui ont joué avec la section cuivre !

Quand on veut, on peut ! C’est aussi cette promiscuité que recherchent le gens lorsqu’ils viennent voir un live à La Féline. Un ampli sur une table, un parterre, le batteur dans un coin, le bassiste près des chiottes, le clavier coincé au bout du bar, c’est ça La Féline.

J’ai des contrebassistes qui ont joué de l’autre coté du comptoir, d’autres sur le bar, tout est possible ! Les conditions ne sont pas celles du Zénith, mais l’esprit est là !

Depuis la réouverture du bar, la sono a été complètement refaite et offre aux groupes et au public une meilleur qualité d’écoute et de jeu.

Vous devez recevoir tous les jours de nombreux cd de groupes qui aimeraient jouer à La Féline. Sur quels critères faites-vous le choix pour sélectionner les groupes qui vont jouer ?

C’est Béatrice Demi Mondaine qui s’occupe de la programmation désormais. Elle écoute les groupes qui nous envoient leur demande sur le myspace du bar et fait la sélection en fonction du planning et de nos gouts. Il n’y a pas d’autre façon de faire. Je n’ai pas le temps d’écouter les 300 cd qu’on me laisse par semaine. Je reçois aussi pas mal de mails de groupes qui viennent de loin pour se produire à La Féline. Tous n’ont pas la juste mesure de la réelle taille du bar. Certain nous demandent des cachets astronomiques et d’autres veulent s’y produire coute que coute (même gratos) parce qu’ils ont entendu parler de l’endroit. C’est plutôt flatteur. La Féline est sur le « tour guide » de chaque groupe australien et japonais qui se respecte, mais nous avons reçu des suédois, des polonais, des mexicains, des brésiliens, des tchèques, des italiens, des portugais, des texans, des new-yorkais, des anglais, des danois, des russes, des grecques, et d’autres encore.Nous sommes heureux de les recevoir, des fois je les héberge à la casa. Bah, je ne vais pas te faire le topo sur la grande famille du rock and roll

Quand un groupe que vous aimez beaucoup n’a attiré que vingt personnes, dans quel état êtes-vous ?

Nous faisons la programmation en fonction de nos gouts et non pas en fonction du public éventuel qui accompagne les groupes. Effectivement cela arrive qu’il n’y ait pas grand monde pour un groupe extraordinaire. Tans pis pour les absents. Ca me fait de la peine, mais nous profitons de la soirée comme si nous étions trois cent. Il y a vraiment moyen de se tenir informé des soirées à La Féline. Quand j’annonce que ça va être génial, ça va VRAIMENT être génial, je ne peux pas faire mieux. Le plus difficile c’est pour les groupes étrangers ou de province qui ne sont pas vraiment connus par la clientèle parisienne. Dommage, ils sont souvent très bons. Nous programmons au moins deux ou trois groupes australiens par mois, obscurs pour la plupart, mais leur qualité de jeu et leur son sont bien au-delà de toute attente, c’est toujours un bonheur. Heureusement nous faisons plutôt salle comble ! Il fait chaud, ça transpire, c’est fort, ça braille, ça hurle, ça fait la fête, ça chante et ça boit; bref, un bar rock and roll dans tout ses états. Paradise et Demi Mondaine sont résidents et à chacun de leur passage c’est un énorme moment. Le meilleur souvenir reste les Lords Of Altamont : il suffit de voir le sourire des gens qui étaient là pour savoir que ces deux soirées ont été exceptionnelles.

Et Kid Congo, tu peux nous en parler ?

J’aime bien Kid parce qu’il m’a fait la gentillesse de se produire à La Féline. J’ai passé quelques jours avec lui à Lyon pour faire la tournée des bouchons et des ptits restos typiques. C’est un vrai bonhomme, vraiment gentil, curieux et élégant (assez rare). C’est aussi un des guitaristes qui a participé à l’histoire des Cramps et du Gun Club, ça fait un beau cv.

J’ai peu de contact avec lui mais on se voit régulièrement à Paris lorsqu’il est en tournée.

Dans votre bar il y a aussi des expositions et des performances burlesques.

Chaque mois, des artistes sont invités à présenter leurs travaux, une expo en fonction d’un thème précis. Il y a eu la boxe, le bondage, le western. Le mois prochain ça sera la Rome antique. Demi Mondaine organise une soirée par mois (concert, dj, déco etc) et on se marre !

Pour les cinq ans du bar c’est Lorenzo qui exposera une série d’œuvres orientées autour de la féline. Il y a encore quelques shows de temps en temps mais comme je trouve que c’est devenu un poil trop à la mode et qu’il n’y a plus un bar sans une pin-up en froufrou qui s’effeuille mollement, j’ai préféré ralentir ce type de prestations, même s’il y a toujours des filles qui se font plaisir à danser sur le bar de façon spontanée !

La Féline est aussi un label (et maintenant un fanzine), peux-tu nous en parler ?

Mathieu (mon partner) et Xavier (leader du groupe Smash) s’occupent du label. Ils gèrent le studio situé à Pantin, et s’occupent d’enregistrer les groupes qui gravitent autours de nous. Ce sont deux fondus de sons et de musique, ils se font plaisir. Deux compilations vinyles en sont nées et nous sommes très fiers d’avoir pu produire et enregistrer presque une trentaine de titres. La Griffe, ce que tu appelles le fanzine est plutôt un programme des évènements que nous réalisons à La Féline Nous présentons, les groupes qui vont venir s’y produire, les djs résidents, les expos, les artistes, et quelques autres conneries. C’est le meilleur moyen pour savoir ce de quoi est faite La Féline. Ca sort une fois par mois. C’est beaucoup de travail, toute l’équipe est vraiment à fond pour faire en sorte que les artistes aient la meilleure exposition possible.

Si vous avez autre chose à rajouter pour nos lecteurs d’Abus Dangereux, c’est ici !

Oui, je voudrais finir par dire que La Féline c’est toute une équipe, dévouée, conviviale et absolument engagée dans l’aventure du bar. C’est Mathieu, mon associé, Beatrice, la directrice artistique, c’est Menza, le fidèle bras droit, c’est Dimi pour la griffe, Ben, Clem, Edith et Jc, qui se démènent pour faire en sorte que tout le monde soit servi en moins de 40 secondes. Ce sont tous les djs résident qui nous régalent les oreilles depuis cinq ans et tous les autres. A tous, merci. Merci aussi à tous ceux qui ont proposé leur soutien pendant la fermeture du bar. A bientôt autour d’une mousse !

Paskal Larsen

La Féline, 6 rue Victor Letalle, 75020 Paris

http://www.myspace.com/lafelinebar

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